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Centre d’arbitrage et de médiation de l’OMPI

 

DÉCISION DE L’EXPERT

Veolia Environnement SA contre Malte Wiskott

Litige n° DCH2004-0010

1. Les parties

La requérante est Veolia Environnement SA, ayant son siège 36/38 avenue Kléber, 75016 Paris, représentée par Me Philipp Dreier, avocat, 46 Rämistrasse, 8001 Zürich.

L’intimé est Monsieur Malte Wiskott, domicilié chemin de Vers 36, 1228 Plan-les-Ouates, représenté par Me Pierre Vuille, avocat, 9 rue Bellot, 1206 Genève.

 

2. Le nom de domaine

Le différend concerne le nom de domaine <veolia.ch>.

 

3. Rappel de la procédure

La requérante a déposé une demande auprès du Centre d’arbitrage et de médiation de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (ci-après désigné le “Centre”) sous forme électronique le 10 juin 2004, et, par voie postale, le 14 juin 2004. Par cette demande, elle conclut à ce que le nom de domaine en cause lui soit transféré et qu’un expert soit nommé au cas où aucune conciliation ne serait effectuée ou qu’une conciliation échouerait.

En date du 11 juin 2004, le Centre a adressé une requête au registre SWITCH (ci-après le “registre”), aux fins de vérification des éléments du litige, tels que communiqués par le Requérant. En date du 14 juin 2004, le registre a confirmé que la partie adverse est bien le titulaire du nom de domaine, a transmis les coordonnées des contacts administratif, technique et de facturation et a confirmé que les Dispositions relatives à la procédure de règlement des différends pour les noms de domaine “.ch” et “.li” (ci après les “Dispositions”) adoptées par SWITCH, registre du “.ch” et du “.li”, le 1er mars 2004 étaient applicables au nom de domaine objet du différend.

Le Centre a vérifié que la plainte répond bien aux exigences des Dispositions les “Dispositions”)

Conformément au paragraphe 14 des Dispositions, le 22 juin 2004, une transmission de la demande valant ouverture de la présente procédure, a été adressée à l’intimé. Conformément au paragraphe 15(a) des Dispositions, le dernier délai imparti à l’intimé pour faire parvenir une réponse était le 12 juillet 2004.

Le 5 juillet 2004, le Centre reçut un courrier postal daté du 2 juillet 2004, et émanant de l’avocat de l’intimé, par lequel celui-ci sollicitait un délai jusqu’au 15 août 2004, pour déposer sa réponse. Pour justifier sa demande, il exposait en substance qu’il serait absent du 5 au 26 juillet 2004 et son client du 15 au 22 juillet 2004. Il ajoutait:

“Cela étant, il m’apparaît d’emblée que la requérante, Veolia Environnement SA, ne démontre pas que Monsieur Malte Wiskott se serais (sic) soumis aux dispositions de Switch qui prévoiraient la compétence du Centre d’arbitrage et de médiation.

“Avez-vous dans votre dossier l’acceptation expresse de mon mandant à cet égard? Sur le fond, nos arguments seront développés dans le cadre du mémoire de réponse que nous produirons dans l’hypothèse où vous voudrez bien prolonger le délai de réponse.

“A défaut, et sans aucune reconnaissance de la compétence du Centre d’arbitrage et de médiation de l’OMPI, vous voudrez bien organiser une audience de conciliation avant qu’un expert de (sic) se prononce, tous droits réservés.”

Une copie en format PDF de ce courrier fut envoyé par courrier au représentant de la requérante le 6 juillet 2004, en lui impartissant un délai au 9 juillet 2004, pour se déterminer.

La détermination de la requérante parvint au Centre le 8 juillet, s’opposant à ce qu’une prolongation de délai soit accordée à l’intimé.

Le 9 juillet 2004, le Centre rejeta la demande de prolongation de délai, et informa les parties qu’à défaut de recevoir une réponse dans ledit délai, la procédure serait poursuivie avec la nomination d’un expert selon le paragraphe 19 des Dispositions.

L’intimé n’adressa aucun mémoire réponse au Centre ou à la requérante et le Centre invita cette dernière à demander la poursuite de la procédure conformément au paragraphe 19 des Dispositions.

En date du 22 juillet 2004, le Centre nomma comme expert dans le présent différend Monsieur Pierre Kobel, avocat à Genève. L’expert constata qu’il avait été désigné conformément aux Dispositions et adressa au Centre une déclaration d’acceptation et une déclaration d’impartialité et d’indépendance, conformément au paragraphe 4 des Dispositions.

Lorsqu’il reçut le dossier le 27 juillet 2004, l’expert constata qu’aucune conciliation prévue par les dispositions du paragraphe 15 lit. d) des Dispositions n’avait encore été tentée, malgré la déclaration dans laquelle l’intimé indiquait qu’il était prêt à prendre part à une audience de conciliation. Dans la mesure où il était désormais saisi du litige, l’expert proposa, dans une ordonnance de procédure du 27 juillet 2004, une audition des parties par conférence téléphonique. Il proposa deux dates aux parties, leur demandant de prendre position dans un court délai. La requérante s’opposa à ce qu’une audition des parties ait lieu. L’intimé y fut favorable. Toutefois, aucune des parties n’était disponible aux dates proposées ni à une autre date raisonnablement proche compte tenu du délai imparti à l’expert pour rendre sa décision. Considérant le caractère exceptionnel d’une telle audition eu égard à la nature écrite de la procédure d’expertise et l’objectif de célérité qui la caractérise, l’expert renonça le 30 juillet 2004, à toute audition des parties.

Le 2 août 2004, l’intimé écrivit au Centre afin de lui demander des explications sur les motifs pour lesquels aucune audience de conciliation n’avait été tentée. Sur ces entrefaits, en consultation avec le Centre et conformément au paragraphe 21 lit. (a) des Dispositions et par Ordonnance de procédure du 4 août 2004, l’Expert renvoya le dossier au Centre afin qu’un conciliateur soit nommé conformément aux paragraphes 16 et ss. des Dispositions.

Dans un courrier au Centre du 2 septembre 2004, le conseil de l’intimé demanda à nouveau un délai, faisant valoir cette fois, son droit à être entendu et l’égalité des parties, sans développer plus avant son argumentation (“je vous saurais gré de bien vouloir nous octroyer un délai pour répondre par écrit à la demande déposée par Veolia Environnement SA. Il s’agit là d’un simple respect des principes du droit d’être entendu et de l’égalité entre les parties”).

Le 7 septembre 2004, le Centre confirma à l’Expert que la conciliation avait échoué, et que la procédure d’expertise reprendrait conformément au chiffre 2 de l’Ordonnance de procédure du 4 août 2004. Sans prendre position sur la demande du conseil de l’intimé du 2 septembre 2004, le Centre envoya le dossier à l’expert.

 

4. Les faits

Après le départ de Monsieur Jean-Marie Messier du groupe Vivendi, la société Vivendi Environnement décida de changer de raison sociale et de nom commercial pour s’appeler désormais Veolia Environnement. Ce changement important fut rendu public le 8 avril 2003, au moyen d’une large campagne de presse organisée par la requérante.

Différentes marques furent déposées par la requérante dans de nombreux pays, dont les marques:

- VEOLIA WATER, dépôt international en cours incluant la Suisse, pour les classes 1/6/9/11/17/19/32/37/39/40/42;

- VEOLIA ENVIRONNEMENT, dépôt international en cours incluant la Suisse, pour les classes 1/6/9/11/17/19/35/36/37/39/40/41/42;

- VEOLIA, en Suisse, No d’enregistrement 514624 déposée le 4 septembre 2003, pour les classes 21/31/44.

En relation avec cette dernière marque, la requérante fit valoir la priorité du dépôt de la marque effectué à Monaco le 10 mars 2003, selon le procès-verbal de dépôt monégasque No 23933.

Le 30 juin 2003, une filiale suisse de Vivendi Environnement fut rebaptisée “Veolia Water Systems Suisse SA”.

 

5. Argumentation des parties

A. Requérante

La requérante expose que la nouvelle dénomination Veolia Environnement fut rendue publique le 8 avril 2003. Selon la requérante, la médiatisation attachée à ce changement de dénomination fit de la marque du groupe une marque notoirement connue dans le monde entier.

Or, c’est précisément le 8 avril 2003, que l’intimé fit enregistrer le nom de domaine en cause. Selon la requérante, l’intimé aurait expressément admis que la nouvelle dénomination de la requérante l’avait amené à réserver ce nom de domaine dans un courrier du 23 juin 2003 :

“En effet, depuis plusieurs mois, ma compagne et une amie ambitionnent d’exploiter un commerce de fleurs, sous une raison sociale Veolia fleurs. Dès lors, lors de l’annonce de la création de la société Veolia par votre cliente, j’ai estimé qu’il était urgent de réserver ce nom de domaine pour la Suisse, afin de préserver les droits d’usage d’un nom que ma compagne évoque depuis plusieurs mois”.

A ce jour, l’intimé se serait limité, pour donner quelque substance à ses allégations, à constituer une page web annonçant la création d’un magasin de vente de fleurs en ligne.

Pour la requérante, ces faits démontrent que l’intimé n’a jamais eu l’intention d’utiliser le nom de domaine dans le cadre d’une activité commerciale propre, mais uniquement pour le vendre au prix fort, à la requérante. Lors d’entretiens qui ont apparemment eu lieu par téléphone, l’intimé exigea une compensation allant de CHF 200’000.- à CHF300’000.- en échange du transfert du nom de domaine en cause.

En tant que titulaire de la marque verbale Veolia, la requérante serait en droit d’exiger le transfert du nom de domaine en cause. Ce dernier est en effet identique à la marque de la requérante. Il est utilisé dans le même territoire que celui sur lequel s’étend le droit à la marque et concerne les mêmes produits que ceux pour lesquels la marque a été enregistrée.

La requête serait également justifiée du point de vue de la loi sur la concurrence déloyale (ci-après ″LCD″), puisque l’enregistrement d’un nom de domaine dans le but exclusif de le vendre ultérieurement à la personne qui bénéficie du droit préférable est déloyal et ne mérite aucune protection.

B. Intimé

Bien qu’il ait n’ait pas produit de mémoire de réponse, l’intimé a contesté dans un courrier du 23 juin 2003, adressé au représentant de la requérante et produit par cette dernière, avoir voulu faire un usage indu du nom de domaine en cause. A cette occasion, il allégua que sa compagne et une amie ambitionnaient depuis plusieurs mois d’exploiter un commerce de fleurs sous une raison sociale Veolia fleurs.

Il ne donna pas plus d’explications sur le nom de domaine en cause ou ses éventuels droits préférables, mais objecta notamment que la requérante n’exploitait aucune activité en Suisse et n’avait enregistré aucune raison sociale au 8 avril 2003. Pour l’intimé, ni le droit de la concurrence, ni celui de la protection des raisons de commerce ne trouvaient application. Estimant que la requérante était une société nouvellement créée, l’intimé concluait qu’elle ne pouvait bénéficier de la protection des marques de haute renommée.

 

6. Discussion et conclusions

A. Questions procédurales

Réponse:

Dans son courrier au Centre du 2 septembre 2004, l’intimé demanda à nouveau qu’un délai lui soit accordé pour répondre.

Alors même que cette question a déjà été résolue tant par le Centre que par l’expert, l’intimé ne fait valoir aucun nouveau motif. L’intimé n’expose notamment pas que des faits nouveaux seraient survenus, lesquels pourraient justifier que l’expert fasse usage des pouvoirs qui lui sont conférés par l’article 21 des Dispositions.

La procédure d’expertise est en principe écrite, sur la base des mémoires (demande et réponse) échangés entre les parties avant la procédure de conciliation. Un délai avait été imparti à l’intimé par le Centre le 22 juin 2004 pour fournir sa réponse d’ici au 12 juillet 2004. L’intimé par l’entremise de son conseil demanda une prolongation de délai le 5 juillet 2004, au motif que ledit conseil serait en vacances du 5 au 26 juillet 2004, et l’intimé lui-même du 15 au 22 juillet 2004. Afin de respecter la célérité de la procédure, le Centre refusa de concéder à l’intimé un délai supplémentaire.

Cette décision fut confirmée par l’expert dans son Ordonnance de procédure du 27 juillet 2004, laquelle constatait qu‘ “en l’absence de motifs particuliers conformément au paragraphe 6 lit. f) des Dispositions, ni l’organe de règlement, ni l’expert ne sont tenus de prolonger un délai. La période estivale pendant laquelle nombre de parties prennent des vacances n’est en soi pas un cas particulier exigeant une prolongation de délai. Contrairement aux tribunaux, le Centre ne connaît pas de féries. Enfin, l’intimé a été informé du délai qui lui était imparti le 22 juin 2004. Ce n’est que le 5 juillet 2004, soit pratiquement deux semaines plus tard qu’il a, par l’entremise de son avocat, sollicité un délai. L’intimé disposait donc du temps nécessaire pour s’organiser et, cas échéant, déposer sa réponse dans le délai imparti”. En l’absence de faits nouveaux justifiant la réouverture d’une instruction écrite, l’expert constate que le droit d’être entendu et l’égalité entre les parties ont été respectés.

Il convient aussi de relever qu’une fois la conciliation achevée, la procédure d’expertise instaurée par les Dispositions, est une procédure relativement sommaire, qui se caractérise par son formalisme et un pouvoir d’examen relativement limité de l’expert (cf. ci-dessous 6b). Contrairement aux sentences arbitrales et à l’instar des décisions rendues dans le cadre de la procédure pour la résolution uniforme des noms de domaine (Uniform Domain Name Dispute Resolution Policy (UDRP)), du service de résolution des litiges de Nominet (Dispute Resolution Service) ou des procédures alternatives de résolution des litiges (PARL) mises en place par l’Association française pour le nommage Internet en coopération, les décisions de l’expert n’acquièrent l’autorité de chose jugée que si les parties ne choisissent pas la voie judiciaire. En effet, les parties peuvent en tout temps saisir les tribunaux (paragraphe 10 des Dispositions), notamment parce qu’elles souhaitent un examen complet de leur situation juridique. La décision finale de l’expert n’entre en force que si elle n’a pas été contestée par devant les tribunaux zurichois (paragraphes 26 et 12(c)(ii) des Dispositions). En d’autres termes, la nature de la procédure est plus voisine de la recommandation ou de la procédure d’expert-arbitre, ce qui tend à expliquer son caractère sommaire eu égard aux droits des parties.

Les droits de l’intimé ayant été préservés, l’expert estime qu’il n’y a pas de raison de revenir sur cette décision.

Compétence:

Le 1er mars 2004, les Dispositions entrèrent en vigueur. Conformément au chiffre 3.6 des Conditions générales, les éventuelles décisions d’expert relatives au service de règlement des différends

“ont force obligatoire pour le détenteur d’un nom de domaine, même s’il n’a pas accepté tacitement de procéder à la procédure de règlement des différends, pour autant que le détenteur concerné:

a. ait enregistré le nom de domaine objet du litige le 1.3.2004, ou après, ou qu’il

b. ait prolongé la validité de l’abonnement pour le nom de domaine objet du litige, le 1.3.2004 ou après.”

A la demande du Centre, le registre confirma par courrier du 14 juin 2004, que l’intimé était bien titulaire du nom de domaine en cause et que celui-ci avait été renouvelé après le 1er mars 2004. En renouvelant intentionnellement l’enregistrement du nom de domaine en cause, l’intimé s’est ainsi engagé à se conformer aux Conditions générales d’enregistrement et se trouve lié par toute éventuelle décision d’expert résultant d’une procédure conforme aux Dispositions (article 3.6 des Conditions générales).

L’expert est donc compétent et la demande recevable.

B. Questions de fond

Conformément au paragraphe 24 lit. c) des Dispositions, “l’expert fait droit à la demande lorsque l’enregistrement ou l’utilisation du nom de domaine constitue clairement une infraction à un droit attaché à un signe distinctif attribué au requérant selon le droit de la Suisse…”

C’est donc à un examen du droit suisse des signes distinctifs, soit le droit des marques, des raisons de commerce, au nom et de la concurrence déloyale, que l’expert doit se livrer dans un premier temps afin de déterminer si la requérante dispose d’un droit attaché à un signe distinctif. Dans un deuxième temps, l’expert doit se demander si l’enregistrement ou l’utilisation du nom de domaine en cause, constitue une violation claire du signe distinctif revendiqué par la requérante, soit une violation qualifiée de la loi.

A ce sujet, le paragraphe 24 lit. d) des Dispositions suggère mais ne prescrit pas (comme l’indiquent les mots “notamment” dans la version française et “insbesondere” dans la version allemande), un test constitué de trois conditions cumulatives:

“(i) aussi bien l’existence du droit attaché à un signe distinctif invoqué que son infraction résultent clairement du texte de la loi ou d’une interprétation reconnue de la loi et des faits exposés, et qu’ils ont été prouvés par les moyens de preuve déposés; et que

(ii) la partie adverse n’a pas exposé et prouvé des raisons de défense importantes de manière concluante; et que

(iii) l’infraction, selon la demande en justice formulée, justifie le transfert ou l’extinction du nom de domaine.”

Le fait que ce test soit constitué de ces trois conditions cumulatives tend à confirmer un niveau d’exigence relativement élevé.

Le critère de la “claire” violation d’un signe distinctif est sujet à interprétation. Une telle interprétation doit tenir compte des différentes versions linguistiques des Dispositions, étant entendu qu’en cas de différences seule la version allemande fait foi (paragraphe 28 des Dispositions). Cette interprétation doit aussi tenir compte de la nature du processus mis en place par les Dispositions. Ce processus se caractérise par une procédure simple, donnant la priorité à la conciliation. La procédure d’expertise n’a en effet lieu que si la demande en a été faite par le requérant (paragraphes 12(c) et 19). La procédure ne tolère en principe qu’un seul échange d’écriture, préalable à la conciliation. Le processus dans son entier est soumis à de courts délais (paragraphes 11(c), 14(a), 14(b), 15(a), (16(b), 17(b), 18(a), 19(i), 20(b), 24(f), 26(a)(b)), lesquels ne peuvent être remis que dans des cas particuliers (paragraphe 6(f)). L’objectif est d’obtenir rapidement un accord par le biais d’une conciliation ou, si celle-ci échoue et que la demande en a été faite, une décision d’expert (paragraphes 12(c) et 19).

Puisqu’en français, est clair ce qui s’impose de soi-même, la procédure semble exiger qu’une décision de transfert ou d’extinction du nom de domaine soit prise que si elle se justifie d’évidence. Compte tenu de la nature des règles en cause, laquelle limite sérieusement les moyens d’instruction à disposition de l’Expert, cette évidence devrait s’imposer rapidement et non pas suite à un examen laborieux. L’expert qui doute devrait renoncer à un examen approfondi, limité qu’il est dans ses moyens d’instruction et cela même si son intuition lui suggère le contraire. Les Dispositions se caractérisent ainsi par un point de tension (un “Spannungsfeld” pour reprendre un terme à la mode), entre le haut niveau d’exigence résultant du terme “clairement” et la nature du processus de résolution des litiges de noms de domaine “.ch” et “.li”, tel que décrit ci-dessus. En pratique, ce point de tension semble se résoudre par la distinction la question de l’existence du droit à un signe distinctif tel qu’invoqué par la partie demanderesse et la question de l’administration et de l’appréciation des preuves. La clarté dont fait état le paragraphe 24 lit. (f)(i) concerne d’abord l’existence du droit revendiqué par le requérant et la violation dudit droit. La question de la preuve fait l’objet d’une proposition séparée (“et qu’ils ont été prouvés par les moyens de preuve déposés”, “und durch die eingereichten Beweismittel nachgewiesen sind”).

Une telle interprétation semble compatible avec le contenu du paragraphe 23 applicable en l’espèce, et qui permet à l’expert de statuer “ sur la demande en se fondant sur le dossier” et d’ “en tirer les conclusions qu’il estime adéquate”, lorsque respectivement, “sans raison valable, une partie néglige d’observer l’un des délais fixés dans les présentes dispositions” et “sans raison valable, une partie néglige d’observer une prescription des présentes dispositions”.

a. La requérante a-t-elle un droit attaché à un signe distinctif selon le droit suisse?

1. Droit des marques

De toute évidence, la requérante est titulaire de la marque VEOLIA en Suisse. Se fondant sur l’article 7 de la loi sur les marques de fabrique (“LMF”), elle peut également revendiquer en Suisse la date du premier dépôt effectué à Monaco le 10 mars 2003. La marque VEOLIA fut enregistrée notamment pour des fleurs naturelles, soit un domaine a priori proche du commerce envisagé par l’intimé. En l’absence d’allégué spécifique de l’intimé sur ce point, l’expert estime que la condition de spécialité caractéristique du droit des marques est ici satisfaite.

2. Droit des raisons sociales

Le droit des raisons sociales qui confère une protection absolue au titulaire du droit sur le territoire suisse ne peut être valablement invoqué par la requérante. Elle n’est en effet pas titulaire de la raison sociale Veolia Water Systems Suisse SA, contrairement à la société suisse.

En tant que tel, “VEOLIA” constitue en fait un “nom commercial”, soit un terme utilisé par le public pour désigner l’entreprise de façon générale, lequel ne peut être protégé que par le biais du droit au nom ou de la loi sur la concurrence déloyale.

3. Droit au nom

Le droit au nom de l’article 29 du code civil suisse (ci-après “CCS”) protège également les personnes morales contre toute usurpation susceptible de leur causer un préjudice. Il bénéficie notamment aux sociétés étrangères qui n’auraient pas de raison sociale en Suisse.

En l’espèce, la requérante a pris des mesures pour faire connaître son nouveau nom par une vaste campagne de presse lancée le 8 avril 2003. Grâce à cette campagne elle se fit identifier de tous les cercles directement intéressés et du public en général, par le nom “Veolia Environnement” dont l’élément caractéristique est VEOLIA. S’agissant d’un terme de fantaisie, le droit de priorité y relatif naît dès son premier usage. Il s’agit d’un signe fort.

La requérante bénéficie indubitablement de la protection de l’article 29 CCS et ce depuis le 8 avril 2003.

4. Droit de la concurrence déloyale

Les développements relatifs au droit au nom ci-dessus valent également en matière de concurrence déloyale applicable cumulativement au droit des marques, des raisons sociales ou du nom (ATF 127 III 33, 38 “Brico”). La requérante, peut donc a priori bénéficier de la protection de la loi sur la concurrence déloyale (ci-après “LCD”).

b. Le nom de domaine de l’intimé bénéficie-t-il d’une protection par le droit des signes distinctifs?

Renonçant à la production d’une réponse, l’intimé s’est limité à alléguer vaguement que sa compagne et l’une de ses amies avaient l’intention de créer un commerce de fleurs sous le nom Veolia.

Toutefois, le 8 avril 2003, date à laquelle la requérante a lancé sa campagne de presse tous azimuts pour informer le public de son nouveau nom “Veolia Environnement” et de sa nouvelle marque, l’intimé s’est limité à enregistrer le nom de domaine en cause. Il n’allègue d’aucune manière avoir pris des mesures pour créer l’entreprise imaginée et la faire connaître. Il n’a enregistré aucune marque, ni raison sociale. Enfin, s’agissant d’un nom de fantaisie qui ne caractérise pas l’intimé, celui-ci ne peut revendiquer de droit au nom. Il ne bénéficie d’aucune priorité d’usage lui permettant éventuellement d’invoquer la LCD.

De toute évidence, l’intimé n’a aucun droit préférable relevant des signes distinctifs sur le nom de domaine en cause.

c. L’enregistrement ou l’utilisation du nom de domaine constitue-t-il clairement une infraction à un droit attaché à un signe distinctif attribué au requérant selon le droit suisse?

Le titulaire d’un signe distinctif peut en revendiquer l’exclusivité dans la mesure où il y a confusion. Selon le Tribunal fédéral suisse, le risque de confusion est identique pour tout le droit des signes distinctifs (ATF 126 III 239, 245 “berneroberland.ch”; ATF 128 III 401, 403 “luzern.ch”). La doctrine fait quant à elle quelques nuances dans l’application du concept de confusion, en fonction du droit des signes distinctif en cause (cf. Willi Ch., “Markenschutzgesetz”, Orell Füssli, 2002, N. 64 ad. Vor 1). L’exclusivité sur un signe distinctif peut donc être revendiquée par son titulaire tant sur la base de l’article 13 LMF, de l’article 956 CO (inapplicable en l’espèce), de l’article 29 alinéa 2 CCS (le risque de confusion étant une modalité de l’usurpation), que de l’article 2 ou 3 alinéa 1 lit. d) LCD.

Il convient de déterminer si l’utilisation d’une dénomination identique ou analogue en relation avec un site internet par une personne ayant des droits moins fondés, crée un risque d’attribution incorrecte du site, soit une possibilité d’erreur d’identification de la personne qui est derrière le site (ATF 128 III 401, 403).

De façon générale, la partie qui ne dispose d’aucune protection particulière au sens du droit des signes distinctifs sur le nom de domaine en cause, se doit de prendre les mesures idoines pour que le nom de domaine qu’il a enregistré se distingue suffisamment du signe distinctif appartenant à la requérante (ATF 128 III 353, 358 “Montana”), soit d’un signe distinctif protégé de façon absolue (ATF 126 III 239, 244).

En l’espèce, le risque de confusion est patent. L’intimé n’a pris aucune mesure pour se distinguer du signe appartenant à la requérante, bien au contraire. Les signes en cause sont en tous points identiques. Or, compte tenu du fonctionnement des noms de domaine, l’utilisation d’un nom de domaine de second niveau confère à l’utilisateur un monopole de fait, lequel crée ipso facto un risque de confusion. Le détenteur légitime du signe protégé est empêché de faire le commerce de ses produits par internet, par le simple fait de l’enregistrement du nom de domaine en cause. Ce n’est en effet pas le contenu du site, en l’espèce pratiquement inexistant, qui doit être considéré, mais le nom de domaine en cause d’une part et le signe distinctif revendiqué d’autre part (Arrêt du Tribunal fédéral du 19 mai 2003, 4C.377/2002, c.2.2 “T-online, tonline.ch”, sic! 10/2003 p. 822, 823; Arrêt du Tribunal fédéral du 7 novembre 2002, “djbobo.ch”, sic! 5/2003 p. 438, 442).

Du point de vue du droit des marques et du droit au nom, on est face à une claire violation des droits de la requérante au signe distinctif “VEOLIA”.

Même si cet examen n’est plus nécessaire, l’expert constate que du point de vue de la concurrence déloyale, soit de l’article 2 LCD, les faits de présente cause et qui sont reprochés à l’intimé, semblent caractéristiques du “cybersquatting” (Arrêt du Tribunal supérieur de Thurgovie du 6 juin 2002, sic! 10/2002, pp. 683 et ss.). On rappellera en effet que l’intimé a enregistré le nom de domaine en cause le jour où la requérante a publiquement annoncé son changement de nom, n’a depuis créé aucune entreprise et s’est limité à annoncer, par une page de garde internet identique depuis plus d’un an selon les pièces fournies par la requérante, la future création d’un commerce de fleurs en ligne. La requérante s’est en effet plainte de ce que l’intimé avait demandé des sommes dépassant largement les frais d’enregistrement du nom de domaine en cause. Même s’ils ne sont pas contestés, ces derniers faits n’ont toutefois pas été prouvés.

L’expert constate être en présence d’une violation claire des droits au signe distinctif appartenant à la requérante. Une telle violation justifie le transfert du nom de domaine à la requérante.

 

7. Décision

Pour les raisons énoncées ci-dessus, et conformément au paragraphe 24 des Dispositions, l’expert ordonne le transfert du nom de domaine <veolia.ch> au profit de la requérante.

 


Pierre Kobel
Expert

Le 12 septembre 2004

 

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