Èñòî÷íèê èíôîðìàöèè:
îôèöèàëüíûé ñàéò ÂÎÈÑ
Äëÿ óäîáñòâà íàâèãàöèè:
Ïåðåéòè â íà÷àëî êàòàëîãà
Äåëà ïî äîìåíàì îáùåãî ïîëüçîâàíèÿ
Äåëà ïî íàöèîíàëüíûì äîìåíàì
Centre d’arbitrage et de médiation de l’OMPI
DÉCISION DE LA COMMISSION ADMINISTRATIVE
DF Presse, SARL contre Resaplanet LTD
Litige n° D2006-0955
1. Les parties
La requérante est DF Presse, SARL, Paris, France, représentée par le Cabinet Hollier-Larousse, France.
La défenderesse est Resaplanet LTD, Port Louis, Ile Maurice.
2. Nom de domaine et unité d’enregistrement
Le litige concerne le nom de domaine <voyagedeluxe.com>.
L’unité d’enregistrement auprès de laquelle le nom de domaine est
enregistré est Network Solutions, LLC.
3. Rappel de la procédure
Une plainte a été déposée par DF Presse, SARL auprès du Centre d’arbitrage et de médiation de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (ci-après désigné le “Centre”) en date du 28 juillet 2006.
Le même jour, le Centre a adressé une requête à l’unité d’enregistrement du nom de domaine litigieux, Network Solutions, LLC, aux fins de vérification des éléments du litige, tels que communiqués par la requérante. L’unité d’enregistrement a confirmé l’ensemble des données du litige en date du 2 août 2006.
Le Centre a vérifié que la plainte répond bien aux Principes directeurs régissant le Règlement uniforme des litiges relatifs aux noms de domaine (ci-après dénommés “Principes directeurs”), aux Règles d’application des Principes directeurs (ci-après dénommées les “Règles d’application”), et aux Règles supplémentaires de l’OMPI (ci-après dénommées les “Règles supplémentaires”) pour l’application des Principes directeurs précités.
Le 18 août 2006, le Centre a adressé à la requérante une notification d’irrégularité de la plainte, qui mettait en évidence que celle-ci n’exposait pas les motifs sur lesquels elle est fondée et ne comportait pas la déclaration, prévue par les Règles d’application, selon laquelle une copie complète de la plainte et de ses annexes a été envoyée ou transmise au défendeur. Le même jour, le Centre adressait également à la requérante une notification relative à la langue de la procédure, dans laquelle il relevait que la plainte avait été déposée en français, alors que la langue du contrat d’enregistrement est l’anglais. Le Centre demandait par conséquent à la requérante de lui fournir la preuve d’un accord entre les parties sur cette question ou, à défaut, de requérir que le français soit la langue de la procédure. La requérante disposait d’un délai au 23 août 2006 pour répondre à ces notifications.
Le 18 août 2006, la requérante s’est adressée au Centre par e-mail. Dans son message, elle demandait si le fait que le site auquel le nom de domaine renvoie soit en français ne suffisait pas pour que la procédure puisse se dérouler en langue française. Par ailleurs, la requérante apportait des éléments complémentaires relatifs à l’existence d’une marque et précisait qu’elle avait bien envoyé un exemplaire de la plainte à la défenderesse.
La requérante a également adressé au Centre, le 22 août 2006, un courrier, accompagné de treize annexes, dans lequel elle présentait une argumentation complémentaire sur le fond du litige.
Conformément aux paragraphes 2.a) et 4.a) des Règles d’application, le 28 août 2006, une notification de la plainte valant ouverture de la présente procédure administrative, a été adressée à la défenderesse. Conformément au paragraphe 5.a) des Règles d’application, le dernier délai pour faire parvenir une réponse était le 17 septembre 2006. La défenderesse a fait parvenir sa réponse le 15 septembre 2006.
La requérante a adressé un e-mail au Centre le 19 septembre 2006, dans lequel elle indiquait avoir bien reçu la réponse de la défenderesse et demandait si elle pouvait y répondre et, dans l’affirmative, dans quel délai et dans quelles conditions. Le 22 septembre 2006, le Centre a répondu qu’il appartenait à la Commission de déterminer la recevabilité, la pertinence, la matérialité et le poids des éléments de preuve.
En date du 28 septembre 2006, le Centre nommait dans le présent litige comme
expert unique Fabrizio La Spada. La Commission administrative constate qu’elle
a été constituée conformément aux Principes directeurs et aux Règles d’application.
La Commission administrative a adressé au Centre une déclaration d’acceptation
et une déclaration d’impartialité et d’indépendance, conformément
au paragraphe 7 des Règles d’application.
4. Les faits
La requérante est une société à responsabilité limitée dont le siège est à Paris, France. Elle édite en France, depuis l’année 2003, un magazine sous le tire “Voyage de Luxe”, spécialisé dans les voyages haut de gamme. La requérante ne dispose pas d’un enregistrement de marque, en France ou ailleurs dans le monde.
La défenderesse a enregistré le nom de domaine <voyagedeluxe.com> le
28 janvier 2006. Au moment du dépôt de la plainte, ce nom de domaine renvoyait
vers le site Internet de la défenderesse, qui propose des offres de voyages
à destination des Caraïbes, de l’Océan indien, de Polynésie et du Moyen-Orient.
La première page de ce site porte notamment la mention “resaplanet.com”
et “Bienvenue sur le site Resaplanet.com le spécialiste des îles”.
5. Argumentation des parties
A. Requérante
En ce qui concerne la première condition selon les Principes directeurs, la requérante reconnaît qu’elle n’est pas titulaire d’une marque enregistrée identique ou similaire à la désignation <voyagedeluxe.com>. Elle invoque cependant les éléments suivants à l’appui de sa requête:
- selon la requérante, celle-ci bénéficierait de droits d’auteur, au sens des dispositions du droit français, sur le titre “Voyage de Luxe”. La requérante allègue en effet que ce titre est original, du fait de l’usage du terme “Voyage” au singulier et de l’utilisation de la mention “de Luxe” qui n’existe sur aucun autre titre de journal;
- la requérante invoque également l’article 8 de la Convention d’Union de Paris, qui protège le nom commercial. Elle soutient à cet égard que la désignation “Voyage de Luxe”, utilisée dans le cadre de son activité d’éditeur du magazine “Voyage de Luxe”, est connue des consommateurs et que c’est sous ce nom commercial que la requérante reçoit son courrier et communique avec sa clientèle.
Se fondant sur ces éléments, la requérante indique que le nom de domaine litigieux est identique au titre de la revue qu’elle édite, ainsi qu’à son nom commercial. Ce nom de domaine est en outre exploité pour un site de vente de voyages en ligne, en sorte que cela crée incontestablement une confusion dans l’esprit des consommateurs.
Dans ses observations complémentaires déposées postérieurement à la demande, la requérante allègue également que bien qu’elle ne soit pas titulaire de droits sur une marque enregistrée, elle bénéficie de droits sur la marque non enregistrée “Voyage de Luxe”. En effet, selon la requérante, la procédure UDRP n’exige pas que le requérant détienne une marque enregistrée. Or, la dénomination utilisée par la requérante est connue par un nombre significatif de consommateurs et constitue, par conséquent, une marque non enregistrée.
Au sujet de la connaissance de la marque par le public, la requérante indique que son magazine “Voyage de Luxe” est édité depuis l’année 2003 et est distribué sur l’ensemble du territoire français. Elle produit une étude réalisée par Ipsos Media qui révèle que 0.7% des 3’728’000 ayant les plus hauts revenus sont des lecteurs de ce magazine. Elle précise également que la marque non enregistrée “Voyage de Luxe” a été exploitée par la requérante trois ans avant l’enregistrement du nom de domaine par la défenderesse.
En ce qui concerne la deuxième condition selon les Principes directeurs, la requérante indique que la défenderesse n’a pas de droits ou d’intérêts légitimes en relation avec le nom de domaine. Selon la requérante, la défenderesse ne détient aucun droit sur la dénomination “Voyage de Luxe”. Au contraire, elle exploite un autre site Internet, à l’adresse <resaplanet.com>, ainsi que d’autres sites (<resamaurice.com> et <resacaraibes.com>, spécialisés dans la vente de voyages dans les îles). Or, le nom de domaine <voyagedeluxe.com> renvoie au site <resaplanet.com>, en sorte que la réservation du nom de domaine litigieux n’a d’autre but que celui de détourner les internautes au profit de la défenderesse.
Enfin, en ce qui concerne la troisième condition selon les Principes directeurs, la requérante indique que la défenderesse a enregistré et utilise le nom de domaine litigieux de mauvaise foi. Selon la requérante, la défenderesse n’a procédé à l’enregistrement du nom de domaine que dans le but de détourner à son profit la renommée du magazine “Voyage de Luxe”. Elle relève à nouveau que le nom de domaine ne correspond pas à un site Internet exploité sous le nom “Voyage de Luxe” mais renvoie sur le site Internet <resacaraibes.com>, ce qui révèle la seule intention de la défenderesse de détourner les utilisateurs d’Internet à son profit. La requérante allègue que l’intention frauduleuse de la défenderesse ne saurait être contestée, dans la mesure où, en sa qualité de professionnel dans le milieu du voyage, elle ne pouvait pas ne pas avoir connaissance du magazine “Voyage de Luxe”, qui bénéficie d’une renommée incontestable dans ce domaine. En outre, selon la requérante, si la défenderesse avait souhaité proposer des voyages haut de gamme, elle aurait créé un site correspondant au nom de domaine qu’elle réservé et aurait utilisé un autre nom de domaine, à tout le moins le nom de domaine <voyagesdeluxe.com>.
Pour l’ensemble de ces motifs, la requérante demande le transfert du nom de domaine.
B. Défenderesse
Dans sa réponse, la défenderesse conteste les arguments de la requérante.
Elle explique qu’elle est une agence de tourisme sur Internet qui propose des séjours haut de gamme depuis six ans. Elle précise également qu’elle est une société mauricienne qui compte dix employés et dont l’organisation de voyages est l’unique activité.
La défenderesse expose qu’elle a enregistré le nom de domaine litigieux afin de consacrer un espace dédié au tourisme haut de gamme, en mettant en ligne ses produits de luxe, destinés à une population aisée et exigeante. Dans la mesure où son marché est essentiellement francophone, elle souhaitait développer l’axe “haut de gamme” au moyen d’un nom de domaine bien reconnaissable en français, tout de suite évocateur et dédié à une gamme de produits de luxe spécifiques.
La défenderesse met en évidence que la désignation “Voyage de Luxe” est l’association de trois mots communs de la langue française, qui n’a rien d’original ni dans sa construction, ni dans son orthographe. En outre, cette dénomination n’est pas une marque déposée dont la requérante peut prétendre être propriétaire. La défenderesse relève par ailleurs que le magazine “Voyage de Luxe” est inconnu dans l’Océan indien car non distribué sur ce territoire, ni dans les hôtels, ni sur les compagnies aériennes desservant cette destination. En outre, le magazine ne dispose d’aucune vitrine Internet et reste totalement inexistant sur le réseau.
En ce qui concerne l’orthographe du nom de domaine, la défenderesse précise qu’elle souhaite utiliser la désignation “Voyage de Luxe” au singulier, car les internautes en phase préparatoire d’un séjour cherchent à organiser un “voyage de luxe” et non pas des “voyages de luxe”.
La défenderesse indique également que les noms de domaine <voyagedeluxe.net>, <voyagedeluxe.de> et <voyagedeluxe.fr> sont tous détenus par des sociétés qui n’ont rien à voir avec la requérante.
En définitive, la défenderesse relève que dans la mesure où personne n’a de droits particuliers sur la dénomination “Voyage de Luxe”, ni la requérante ni la défenderesse, ce nom de domaine peut être enregistré par qui le réserve en premier. Selon la défenderesse, la requérante cherche à contourner cette règle de manière malhonnête.
Enfin, la défenderesse relève que la requérante a enregistré les noms de domaine <voyage-de-luxe.com>, ainsi que les noms <voyage-de-luxe.fr> et <voyagedeluxe.eu>, qui renvoient vers des pages vierges. La requérante dispose ainsi de la possibilité de développer son espace d’information sur Internet.
Pour l’ensemble de ces motifs, la défenderesse sollicite le rejet de
la plainte.
6. Langue de la procédure
Selon le paragraphe 11.a) des Règles d’application, la langue de la procédure est, sauf convention contraire entre les parties, la langue du contrat d’enregistrement. En l’espèce, le 2 août 2006, l’unité d’enregistrement auprès de laquelle le nom de domaine a été enregistré a informé le Centre que la langue du contrat d’enregistrement est l’anglais.
La requérante a toutefois déposé sa plainte en français et, dans son courrier du 22 août 2006, a requis que le français soit la langue de la procédure, pour les raisons suivantes:
- le site “www.voyagedeluxe.com”, tout comme les autres sites Internet de la défenderesse, est rédigé en français;
- lorsque la requérante a écrit à la défenderesse, celle-ci a répondu en français;
- la langue utilisée pour le nom de domaine lui-même est le français;
- la défenderesse a son siège social à l’Ile Maurice, dont la langue officielle, qui est également la plus parlée, est le français.
Dans sa réponse, la défenderesse ne s’est pas prononcée expressément sur la question de la langue de la procédure. Elle a cependant produit sa réponse en français. Elle a, en outre, indiqué, dans sa réponse, que l’essentiel de son marché est francophone (95% de son chiffre d’affaires).
Au vu du fait que les deux parties ont volontairement procédé en français,
en produisant sans objection leurs écritures dans cette langue, l’expert
considère qu’il existe un accord de leur part sur le français comme langue
de la procédure. Le choix du français est par ailleurs cohérent avec les éléments
mentionnés ci-dessus.
7. Discussion et conclusions
Selon le paragraphe 4.a) des Principes directeurs, afin d’obtenir gain de cause dans cette procédure et obtenir le transfert du nom de domaine, le requérant doit prouver que chacun des trois éléments suivants est satisfait :
i) Le nom de domaine est identique ou semblable au point de prêter à confusion, à une marque de produits ou de services sur laquelle le requérant a des droits ; et
ii) Le défendeur n’a aucun droit sur le nom de domaine ni aucun intérêt légitime qui s’y attache ; et
iii) Le nom de domaine a été enregistré et est utilisé de mauvaise foi.
Le paragraphe 4(a) in fine des Principes directeurs indique qu’il appartient au requérant d’apporter la preuve que ces trois éléments sont réunis.
A. Identité ou similitude prêtant à confusion
Cette condition soulève deux questions : (1) le requérant a-t-il des droits sur une marque de produits ou de services et (2) le nom de domaine est-il identique ou semblable à cette marque au point de prêter à confusion?
En l’espèce, la requérante admet qu’elle n’est pas titulaire d’une marque enregistrée sur laquelle elle peut fonder sa requête. Elle invoque cependant les droits suivants à l’appui de ses prétentions:
- titularité de droits d’auteur sur le titre de sa revue “Voyage de Luxe”
- nom commercial protégé au sens de l’article 8 de la Convention d’Union de Paris
- droits sur une marque non enregistrée “Voyage de Luxe”
Ces trois arguments seront examinés successivement ci-dessous.
1. Droits d’auteur sur le titre de revue “Voyage de Luxe”
La requérante allègue qu’elle bénéficie, en droit français, de droits d’auteur sur le titre de la revue qu’elle édite, “Voyage de Luxe”, dans la mesure où ce titre présente un caractère original.
La titularité de droits d’auteur ne satisfait toutefois clairement pas la condition duparagraphe 4.a).i) des Principes directeurs, qui exige que la requête soit fondée sur une marque de produits ou de services.
L’expert relève en outre qu’en tout état de cause, la requérante
n’apporte aucun élément démontrant que la désignation “Voyage de
Luxe” présente un caractère original. Au contraire, cette expression,
utilisée pour désigner le titre d’un magazine consacré aux voyages de
luxe, apparaît descriptive et n’est pas de nature à répondre au critère
d’originalité (voir la décision DF Presse, SARL contre De Fracl Investissements,
OMPI Litige n° DFR2006-0005, dans laquelle l’expert
a rejeté la requête visant au transfert à la même requérante du nom de domaine
<voyagedeluxe.fr>).
Cet argument doit par conséquent être rejeté.
2. Nom commercial
La requérante soutient que la désignation “Voyage de Luxe” correspond à son nom commercial, dans la mesure où ce titre de revue est connu des consommateurs et que c’est sous ce nom qu’elle reçoit son courrier et communique avec sa clientèle.
A nouveau, l’expert relève que l’existence éventuelle d’un nom commercial ne satisfait pas la condition du paragraphe 4.a).i) des Principes directeurs, qui exige que la requête soit fondée sur une marque de produits ou de services.
Quoi qu’il en soit, même si la requérante a produit dans le cadre de
la procédure des éléments démontrant qu’elle édite un magazine intitulé
“Voyage de Luxe”, elle n’a pas prouvé, ni même rendu vraisemblable,
que ce titre constitue le nom commercial de son entreprise. Les documents qu’elle
a fournis à cet égard, soit un certain nombre de lettres et communications adressées
à Voyage de Luxe ou DF Presse/Voyage de Luxe, sont insuffisants pour établir
que la requérante serait connue sous le nom commercial “Voyage de Luxe”
(voir également la décision DF Presse, SARL contre De Fracl Investissements,
OMPI Litige n° DFR2006-0005).
Cet argument doit par conséquent être rejeté.
3. Marque non enregistrée
Dans son écriture complémentaire en réponse à l’avis de défectuosité
du Centre, la requérante allègue qu’elle bénéficie de droits sur la marque
non enregistrée “voyage de luxe”. Elle indique à cet égard qu’“il
n’est pas nécessaire, conformément à la jurisprudence de l’OMPI
(cf. ISL Marketing AG, and the Union des Associations Européennes de
Football v. The European Unique Resources Organisation 2000 B.V., OMPI
Litige n° D2000-0230), pour engager une procédure UDRP, de détenir
des droits sur une marque enregistrée”.
A l’appui de son argumentation, la requérante explique que la dénomination “Voyage de Luxe” est “connue par un nombre significatif de consommateurs”. En particulier, selon une étude réalisée par Ipsos Media, la revue éditée par la requérante serait lue par 0.7% des français ayant les plus hauts revenus.
Ainsi, d’après la requérante, “la Société DF Presse bénéficie en conséquence d’un droit sur la marque non enregistrée “Voyage de Luxe” pour désigner un journal de voyages et plus particulièrement un magazine spécialisé dans les voyages hauts de gamme”.
La requérante affirme avec raison que les Principes directeurs, bien qu’ils
requièrent que le requérant puisse se prévaloir d’une marque de produits
ou de services sur laquelle il “a des droits”, n’exigent pas
nécessairement que la marque soit enregistrée. Il existe ainsi de nombreuses
décisions dans lesquelles les experts ont reconnu l’existence de droits
sur des marques non enregistrées (voir par exemple Imperial College v. Christophe
Dessimoz, OMPI Litige n° D2004-0322
et décisions citées).
Cependant, pour bénéficier de droits sur une marque non enregistrée, la requérante
ne peut pas se contenter de démontrer qu’elle utilise une certaine désignation
dans le commerce. Elle doit au contraire établir que le signe revendiqué a acquis
une capacité distinctive associée à ses produits ou services. Cette capacité
distinctive peut notamment être démontrée par l’étendue et la durée de
l’usage, le type de publicité donnée au signe, des sondages d’opinion,
etc. (Amsec Enterprises, L.C. v. Sharon McCall, OMPI
Litige n° D2001-0083).
Il n’est pas nécessaire que la reconnaissance par le public de la capacité
distinctive de la marque, autrement dit l’association faite par le public
entre la marque et les produits et/ou services de la requérante, existe dans
le monde entier. Une reconnaissance locale peut suffire. En outre, il n’est
pas requis que la désignation soit notoire ou ait acquis une haute renommée
(Australian Trade Commission contre Matthew Reader, OMPI
Litige n° D2002-0786).
La nécessité de prouver une association, de la part des consommateurs, entre
la désignation et les produits et/ou services de la requérante est particulièrement
importante lorsque la marque a un caractère descriptif (Emmanuel Vincent
Seal Trading as Complete Sports Betting v. Ron Basset, OMPI
Litige n° D2002-1058). Or, l’expert considère que le signe “Voyage
de Luxe” est descriptif lorsqu’il est utilisé “pour désigner
un journal de voyages et plus particulièrement un magazine spécialisé dans les
voyages hauts de gamme”. Par conséquent, si la requérante ne parvient
pas à apporter cette preuve, elle ne peut se prévaloir de droits sur une marque
au sens des Principes directeurs (Emmanuel Vincent Seal trading as Complete
Sports Betting v. Ron Basset, OMPI Litige
n° D2002-1058).
Dans le cas d’espèce, les éléments produits par la requérante ne permettent pas de retenir que l’indication “Voyage de Luxe” aurait acquis une capacité distinctive particulière, telle que les consommateurs l’associeraient à ses produits et services plutôt qu’à des produits et services offerts par des tiers. En particulier, selon l’étude citée par la requérante, seuls 0.7% des français ayant les plus hauts revenus sont des lecteurs de la revue intitulée “Voyage de Luxe”. En outre, d’après cette même étude, lorsque l’analyse est effectuée spécifiquement sur le groupe cible des “consommateurs de vacances”, ce ne sont que 1.4% des français ayant les plus hauts revenus qui lisent la revue “Voyage de Luxe”. L’expert considère que de telles proportions sont insuffisantes pour prouver que la désignation descriptive “Voyage de Luxe” a acquis la capacité distinctive requise. L’expert relève également que la revue éditée par la requérante n’est distribuée que depuis 2003, ce qui ne permet pas de retenir un usage particulièrement long.
L’argument de la requérante doit par conséquent être rejeté.
La requérante n’a ainsi pas démontré que la première condition selon les Principes directeurs est réalisée. Sa requête doit donc être rejetée.
B. Droits ou légitimes intérêts et enregistrement et usage de mauvaise foi
La requête devant être rejetée pour les raisons mentionnées ci-dessus, il n’est pas nécessaire d’examiner les deux autres conditions posées par les Principes directeurs, savoir l’absence de droits ou d’intérêts légitimes de la part de la défenderesse, ainsi que l’enregistrement et l’utilisation du nom de domaine de mauvaise foi.
L’expert relève toutefois qu’au vu des éléments figurant au dossier, il apparaît à première vue que ces conditions ne sont pas réalisées, notamment en raison du fait que la défenderesse utilise le nom de domaine litigieux pour offrir des services dans le domaine du voyage, soit en relation avec la fonction descriptive du nom de domaine, et qu’il n’existe pas d’indications démontrant une mauvaise foi particulière au sens des Principes directeurs.
8. Décision
Conformément aux articles 4(i) des Principes directeurs et 15 des Règles d’application, la plainte est rejetée.
Fabrizio La Spada
Expert Unique
Date : Le 17 octobre 2006